Loto pépère et Rapido d’enfer

D’un côté, le Loto : trois tirages par semaine après le diner, avant une bonne soirée TV. Une distraction de père de famille, choisie pour le rêve raisonnable d’une vie enfin délivrée des soucis d’argent; de l’autre côté du ticket, le Rapido : un loto toutes les 5 minutes avec tirage au comptoir du bistrot et tournée garantie à la clé. Un gouffre à finances pour gagne-petit qui dépense-gros.

Des exemples, côté courses ? Allons-y. D’une part, le tiercé : une escapade dans le monde sans grand risque du jeu de l’amour des chevaux et du hasard dans la troisième; d’autre part, le pari « course par course » : à peu près autant d’occasions de parier sa chemise qu’il existe de courses pour la perdre, chaque jour sur tous les hippodromes de France et de Navarre.

Un tour, côté casino ? Ici, la roulette : un jeu d’initiés où « la mise » a aussi sens d’apparence, où le cérémonial fait partie du plaisir; là, le bandit manchot : un jeu solitaire et mécanique où la répétition du geste est censée compenser les aléas de la chance.

Ce qui distingue le jeu dangereux de celui qui l’est moins, c’est son rythme. Plus rapide est celui-ci, plus nombreuses sont les occasions de se persuader qu’on va gagner. En oubliant que les occasions de perdre augmentent dans les mêmes proportions.

L’impact d’un gros gain initial est par ailleurs un des facteurs classiques d’installation du jeu pathologique.

Joueurs, toxico : même galère

Il est admis aujourd’hui que la prise répétée de toute substance psychoactive (drogue) dérégule le couple de neurotransmetteurs qui permet de contrôler les réactions face à un événement.  Seule la prise de la drogue permet de reconnecter immédiatement et artificiellement ces neurones. Ce processus obtenu avec la cocaïne, la morphine, les amphétamines, le tabac ou l’alcool peut-il être obtenu par le jeu ?

La réponse n’est pas évidente car la très grande majorité des joueurs pathologiques souffre de troubles associés. Il est donc possible que ces troubles, y compris la présence d’addictions au tabac et à l’alcool, rendent vulnérable le sujet, le jeu pathologique n’étant alors qu’une des expressions et non pas l’origine du phénomène addictif.

Certains joueurs n’ayant aucun autre trouble associé, il n’est toutefois pas exclu que le simple fait de s’adonner au jeu puisse, comme le ferait une drogue, entraîner de telles modifications du fonctionnement du système nerveux central. Chez certaines personnes, le stress et l’angoisse engendrés par le jeu pourraient reproduire, en l’absence de produit, des activations neuronales analogues à celles obtenues avec des substances addictives.