La mauvaise foi n’ayant pas de limite, mieux vaut laisser aux fumeurs militants leurs certitudes commodes et signaler aux accros moins activistes que la fumée du tabac s’attaque avec une efficacité incomparable au système respiratoire. Un petit chiffre pour la démonstration ? Allons-y : 85% des 28 000 cas annuels de cancer du poumon se déclarent chez des fumeurs… Voilà qui replace le gaz d’échappement à sa juste place, loin derrière la cigarette.

Il n’empêche que cette remise à niveau ne doit pas aboutir au manichéisme navrant du tout blanc ou du tout noir. Respirer n’est pas toujours une partie de plaisir. Chaque jour, un adulte inhale 10 000 à 20 000 litres d’air en fonction de sa morphologie, de ses activités. Outre les gaz vitaux qui représentent environ 99% de sa composition, cet air peut également contenir des polluants d’origine naturelle ou provenant des activités humaines (production d’énergie, industrie, agriculture, transports…). Et c’est ce petit 1% là qui crée 100% de nos tracas sanitaro-environnementaux

Je sais que je ne sais rien

Brave Socrate. Si son très philosophique « Je sais que je ne sais rien » était plus souvent adopté par nos experts universels, ce serait déjà quelque chose ! C’est en tout cas le parti que semble défendre notre très officiel Institut de Veille Sanitaire (INVS) qui explique modestement que l’impact de la pollution atmosphérique est particulièrement difficile à appréhender pour au moins cinq raisons majeures.

La première raison est la complexité même de cette pollution, formée d’un grand nombre de polluants qui, de plus, réagissent entre eux pour former des polluants secondaires. Plus on est de fous…

La deuxième raison est liée à l’exposition à la pollution : elle dépend des lieux fréquentés par l’individu mais aussi des activités qu’il y accomplit. Pas exposé, pas malade.

Troisième difficulté relevée par l’INVS, le rapport individu / collectivité : même si les risques individuels sont faibles, les impacts peuvent s’avérer importants à l’échelle d’une population. Un exemple au hasard : la grippe A.

Avant dernier point, l’état de santé et les antécédents pathologiques de chacun vont modifier les sensibilités individuelles à la pollution atmosphérique. Les plus fragiles seront les plus touchés.

Enfin, les maladies repérées étant souvent multifactorielles, la pollution n’est qu’une des causes qui contribuent à leur apparition. L’effet boule de neige…

Tout de suite ou maintenant ?

Comme rien n’est simple et que tout se complique, les effets de la pollution atmosphérique se répartissent en deux groupes, celui des effets à court terme et celui – vous l’aviez deviné ! – des effets à long terme.

D’un côté, des manifestations cliniques, fonctionnelles ou biologiques aiguës, survenant dans des délais brefs (de quelques heures à quelques semaines) après exposition ; de l’autre, le développement de processus au long cours pouvant amener à la maladie, voire au décès.

La pollution atmosphérique peut être à l’origine de la survenue de symptômes respiratoires (toux, hypersécrétion nasale, expectoration chronique, essoufflement). Le tristement célèbre ozone, est aussi un facteur majorant le nombre de crises d’asthme et d’allergies.
Mais, les effets de la pollution atmosphérique ne se limitent pas aux pathologies respiratoires. Celle-ci peut également participer à la genèse de pathologies cardio-vasculaires (infarctus du myocarde, angine de poitrine ou troubles du rythme cardiaque) et d’irritations nasales, des yeux et de la gorge.

Péril en la demeure

On croit être à l’abri dans son petit Sam’Suffit douillet, home sweet home, et c’est tout le contraire qui se produit. Si l’on respirait mal dehors, on étouffe dedans. L’Académie Nationale de Médecine le rappelait encore récemment dans une communication publique : « En termes de risques, l’exposition domestique cumule les polluants de l’air extérieur et ceux propres à l’habitat en nombre élevé et dangerosité variable, pour une durée d’exposition représentant 80% du temps [NDLR : le temps que l’on passe chez soi] ». Comme souvent, avec les alertes sanitaires, on reste sur sa faim : « Les études épidémiologiques sont encore trop rares pour dresser un bilan sanitaire, à l’exception des allergènes, de la fumée de tabac, du radon et de l’amiante ». Les allergènes qu’on croyait réservés aux rhinites printanières, le tabagisme qu’on pensait relégué sur le trottoir, le radon dont tout le monde ignore l’existence et l’amiante, prétendument confinée dans les vieux bâtiments publics et les usines de grand papa… Excusez du peu !