mots clé : Accidents domestiques, accidents de la vie courante, accidents d\'enfants

Home sweet home

Péril en la demeure

On vient de faire 500 kilomètres en voiture avec des fous du volant à chaque carrefour, des freins qui chauffent, des pneus qui crèvent, un moteur qui peine, des nerfs qui lâchent. Enfin, on arrive à la maison. On ferme la porte derrière soi. Sauvé ? Pas du tout : statistiquement, c’est maintenant qu’on court le plus de risques !

Un radar entre la chambre et le salon, façon bretelle d’autoroute ? Une caméra dans la cuisine et la salle de bains, genre Loft Story ? Un vigile devant le barbecue, style Fort Knox ? Ouf, heureusement, les délires sécuritaires les plus excessifs ne devraient quand même pas nous faire basculer dans ce monde formaté au risque zéro, calibré pour que rien n’échappe à la norme.

Pas de radar, pas de caméra, pas de vigile mais il va falloir élaborer un plan de bataille alternatif pour que les accidents qui surviennent à la maison cessent d’entraîner chaque année bien davantage de morts que ceux provoqués par la route. Et un sacré plan de bataille est nécessaire parce que les salles de bains, les cuisines et les chambres à coucher tuent désormais quatre fois plus que toutes les départementales et voies rapides réunies !

Mètres carrés de plancher et kilomètres de bitume

20 000 victimes sur quelques mètres carrés de plancher, de carrelage ou de gazon contre un peu moins de 5 000 sur des milliers de kilomètres de bitume, de goudron et d’asphalte.

L’échelle est donnée, le problème est posé et il n’est pas forcément simple à régler. D’abord parce que le sentiment de sécurité que, fort heureusement, on ressent lorsque l’on est à la maison, peut aussi s’avérer être notre pire ennemi.

Facile à comprendre : chez moi, pas d’interdit, pas de contrôle, pas de compte à rendre... Si je veux laisser traîner mon verre et les cacahuètes sur la table basse du salon, c’est mon droit. Ni police, ni contrôle, ni Dieu ni Maître !

Evidemment, il ne faudrait pas que ce petit monstre, apprenti bipède et prénommé Lucas s’amuse à me le faire regretter. Et s’il me prend l’envie légitime de passer un coup de fil à ma copine, à ma mère ou à la superette du coin, il serait dommage que je laisse ma petite Aurore apprendre à nager seule dans la baignoire. A 6 mois, il est rare que ça se passe en douceur…

Pas d’interdit, pas de contrôle, mais, forcément un peu de bon sens. Si cette « petite » condition était remplie, on verrait sans doute descendre à la vitesse grand V le compteur des malheurs majuscules.

Toujours plus facile à dire qu’à faire…

On les connaît, tous ces conseilleurs, parangons de vertu, qui nous serinent les recettes du bien manger, du bien bouger et nous font miroiter les paradis de la vie saine, pure, joyeuse et sans souci. Mais en matière « d’accidents de la vie courante », le grand responsable de l’accident… c’est la vie courante. C'est-à-dire l’accumulation de moments où l’attention se relâche, où la vigilance se met en berne pour la bonne, l’excellente, l’implacable raison que, dans une situation exactement similaire à celle de la veille, de l’avant-veille ou du jour précédent, on ne voit pas pourquoi un drame se produirait justement aujourd’hui.

Parce qu’un enfant n’avait encore jamais mis les doigts dans une prise de courant, on imagine qu’il ne le fera pas, ou qu’il ne grimpera pas sur le tabouret près de la fenêtre, ou qu’il n’ouvrira pas le placard à produits ménagers, ou l’armoire à pharmacie.